31/05/2019

10 conseils pour s'améliorer et oser improviser en cuisine




Il faut que je vous avoue quelque chose : je suis incapable de suivre une recette à la lettre.
J'ai toujours envie de changer quelque chose, de changer un ingrédient par quelque chose que j'ai déjà dans mon frigo, d'échanger une épice contre une autre, de modifier les quantités à mes goûts, ou d'autres perversions qui éloignent parfois drastiquement mon résultat de la recette originale. (C'est pour ça que je ne fais jamais de pâtisserie d'ailleurs, beaucoup trop précis).

Pour moi, les recettes sont des sources d'inspiration, des leçons de cuisine à interpréter, des lignes directrices. Pas des modes d'emploi Ikéa où si la vis 425aB manque, le meuble est foutu.

C'est en lisant beaucoup trop de livres de cuisine que j'ai acquis des bases qui me permettent d'improviser sans recette. Et, depuis quelques années, en lisant des blogs et site de cuisine et en regardant des heures de vidéos sur youtube. Quand j'ai envie de tester une nouvelle recette que je n'ai jamais faite, je vais lire et regarder trois, quatre, dix recettes en ligne et dans ma collection de livres, toutes les lire en détails, puis finir par faire un mix entre les conseils qui me paraissent les plus pertinents (en cas d'hésitation, c'est Kenji Lopez-Alt qui gagne car sa manière scientifique de tout expliquer ne laisse aucune place au doute). 

J'ai pris beaucoup d'assurance à force de tester des nouveaux ingrédients et de nouvelles recettes, et j'improvise ou je teste plusieurs nouvelles recettes ou ingrédients par mois et parfois par semaine. Sur instagram, vous êtes nombreux·ses à me poser des questions de quantités précises quand je publie quelque chose de nouveau. Souvent ma réponse est malheureusement "je ne sais pas, j'ai fait à la louche". Vous m'avez fait part de votre frustration et beaucoup d'entre vous m'ont dit ne pas oser improviser en cuisine et avoir besoin de suivre une recette très précise pour oser vous lancer dans un plat que vous n'avez jamais cuisiné auparavant. C'est ce qui m'a motivé à écrire cet article. 

10 conseil pour s'améliorer
et oser improviser en cuisine


1. Goûter


Tout le temps. A chaque étape, chaque ingrédient. Je vous recommande une tasse avec des petites cuillères à côté de votre cuisinière. À côté de ma cuisinière j'ai : un contenant avec spatules, fouets, pinces, etc. ; un contenant avec des petites et grandes cuillères, fourchettes et petits couteaux d'offices ; un petit plateau avec sel(s), poivre(s), huile(s).

Goûter c'est penser à l'assaisonnement, c'est comprendre comment un aliment change au fur et à mesure de la recette et donc pouvoir improviser par la suite avec le même ingrédient. Goûter c'est aussi parfois penser à une épice qui s'y glisserait bien, à une nouvelle idée pour un prochain test.

Goûter c'est la GRANDE différence entre quelqu'un qui cuisine bien et quelqu'un qui ne cuisine jamais.

2. Se préparer avant de cuisiner et lire la recette en entier


Lire les recettes en entier. Vérifier la liste des ingrédients et des ustensiles, ou de leurs remplaçants si nécessaire. Aller faire pipi, s'attacher les cheveux, mettre un tablier, se laver les mains. Ça peut paraitre bête comme conseil, mais c'est une bonne manière de se mettre dans la bonne énergie pour se concentrer sur ce qu'on fait.

Et puis, il arrive souvent que des ingrédients ou partie de recette doivent par exemple tremper, mariner, ou lever pendant quelques minutes ou quelques heures. Si l'on n'a pas lu la recette avant de s'y lancer tête baissée, on peut tout à coup se retrouver complètement bloqué, ce qui est très frustrant et décourageant.

3. Faire une mise en place


Une mise en place, c'est laver, parer (trier, éplucher, etc.) et couper tous les ingrédients de la recette, avant de commencer une cuisson ou de les assembler

Quand on s'occupe de chaque ingrédient avant de commencer une cuisson ou de tout mélanger, on peut les goûter, crus, sans artifices et souvent, ça donne d'excellentes idées pour d'autres accords, ou une légère adaptation d'une recette.

La plupart des ingrédients végétaux, vont changer de goût selon la saison, leur taille ou variété, et même la région dont ils viennent. En les goûtant au stade de la mise en place, ça permet d'adapter la recette à vos ingrédients. Imaginez la différence entre une petite tomate cerise super acide de supermarché et une grosse tomate noire de crimée hyper sucrée. Si votre recette dit "une tomate", de laquelle elle parle ? Probablement d'aucune des deux, il faut donc adapter, toujours. Et ça peut aussi permettre d'avoir des idées avec les ingrédients de vos placards/frigo.

Mise en place pour oyakodon, où tout doit cuire de manière simultanée et super minutée.

Ensuite et surtout, une mise en place permet, au moment où il faut suivre la recette, combiner, cuire, etc. de ne plus perdre de temps, et de pouvoir se concentrer sur la bonne température, la bonne cuisson, le bon assaisonnement. Ce qui offre plus de temps pour goûter et observer ce qui se passe. Et ce qui évite donc beaucoup de ratages.

Enfin, de nombreux ingrédients gagnent à être salés en amont. La plupart des viandes et des poissons, mais aussi les tomates qui deviennent plus goûtues et moins aqueuses, le concombre, les aubergines. (Attention, pas tous les ingrédients, ça va cuire la laitue ou empêcher vos champignons de prendre des couleurs par exemple.) Le temps de finaliser la mise en place, le temps de salage est souvent suffisant et les ingrédients sont tous à la même température ambiante, ce qui est nécessaire pour la plupart des recettes.

4. Assaisonner chaque composant du plat


Vous avez déjà oublié de mettre du sel dans l'eau de vos pâtes ? Même avec une sauce trop salée pour compenser, le plat est déséquilibré. C'est pareil pour toutes les recettes. 

Il est beaucoup plus facile de saler ingrédient par ingrédient, car on sait de combien cet ingrédient-là a besoin de sel (ou de sucre, ou d'acide, etc.). Il y a les pièges habituels des aliments qui perdent beaucoup de volume ou d'eau (épinards, champignons, etc.) où il vaut mieux saler après qu'ils aient réduits, mais on les sale quand même de manière individuelle plutôt que juste le plat final.
Surtout que, on revient à l'analogie des pâtes non salées, le sel en surface, ajouté à la fin, n'a pas du tout les mêmes propriétés que le sel qui aura pénétré un ingrédient. 
Une salade mêlée sera bien meilleure si la base de laitue (ou autre salade à feuilles) est assaisonnée (huile-citron-sel par exemple) et bien mélangée, avant qu'on y dépose les autres ingrédients, tous assaisonnés également.

En assaisonnant chaque ingrédient, il est beaucoup plus rare de se planter et de trop saler quelque chose, car on peut toujours récupérer en sous-salant l'ingrédient suivant. De manière générale, celles et ceux qui ne cuisinent pas souvent ont tendance à sous-saler et à oublier d'assaisonner, donc c'est fade. Pour certains plats pas super punchy, il suffit souvent d'ajouter un peu de sel, ou un peu de jus de citron et un tour de moulin à poivre, pour que le plat reprenne du poil de la bête.

En cas de doute sur l'utilisation du sel, toujours se reporter à Samin Nosrat : (plus d'infos)



5. Penser aux textures


Vous faites un plat très liquide (soupe par exemple) ? Pensez à un truc croustillant-croquant à ajouter : croûtons ou noix en garniture, toast en accompagnement, pourquoi pas des chips de bacon ou de chorizo, qu'avez-vous de croustillant dans vos placards ? Une salade ? Mettez-y un truc moelleux, un truc croustillant, un truc crémeux, un truc avec de la mâche : votre salade en sera d'autant plus intéressante à manger et un meilleur véhicule pour les saveurs. Et ça marche pour tout. Si c'est mou, ajoutez un truc qui croustille, si c'est liquide, un truc qui se mâche et/ou croustille, s'il y a beaucoup de mâche, un truc crémeux, etc. Ce n'est vraiment pas compliqué, mais ça améliore grandement le plaisir ressenti en mangeant un plat. 

6. Penser aux 7 goûts


Mais elle est folle, il n'y en a que 5 ! Le sucré, le salé, l'acide, l'amer et l'umami. (Toi qui ne sais pas ce que c'est l'umami, tu es gentil et tu vas lire cet article avant de lire la suite. Je t'attends ici.) Donc 5, pourquoi elle dit 7, elle est folle.

Je dis 7, parce que ça va pas tarder, les études sont en cours, je ne sais pas dans quel ordre ce sera, ni quand, mais on parlera bientôt de 7 goûts (c'est-à-dire ceux pour lesquels la langue a des capteurs capables de percevoir, le reste ce sont des saveurs, explications complètes). Les deux nouveaux goûts seront "l'oléogustus", c'est-à-dire le gras (ou la sensation de gras) et le piquant.

Qu'est-ce que ça veut dire ?
Un exemple avec la tarte à la rhubarbe. Pourquoi c'est si bon ? Parce que la rhubarbe est acidulée (acide : check), qu'on la dépose sur une pâte brisée (au beurre, oleogustus : check) recouverte d'amandes pilées (amer : check), qu'on la sucre (check) et qu'on la fait caraméliser au four. Cette tarte à elle seule comporte donc 4 des 7 goûts. C'est leur équilibre qui va provoquer votre plaisir. On ne va évidemment pas rajouter du sel et du piment sur une tarte à la rhubarbe (quoi que j'ai testé poivre-rhubarbe, c'est très bon), ce n'est pas nécessaire d'avoir 7 goûts à chaque plat. Mais si votre recette ne comporte qu'un seul des sept goûts, l'aspect salé par exemple, il est fort probable qu'elle ne sera pas passionnante.

Parfois en ajoutant juste une touche d'acidité (citron, vinaigres, yoghourt, etc.) le plat se relève, parfois il prend de la profondeur avec juste une touche de douceur (sucre, miel, mélasse, sirop, tomate, carotte, etc.), souvent il prend de l'ampleur grâce à l'umami (surtout quand on additionne deux sources). Un plat peut être très léger en gras, mais la touche d'huile d'olive/de colza/de noix ou la noix de beurre cru finale, vont amener un plaisir en bouche inimitable.

En "inventant" une recette, cette réflexion autour des 7 goûts et de quel ingrédient amène quoi permet parfois des sursauts d'imagination. Quel ingrédient pourrait amener la touche d'acidité ? Quel ingrédient pourrait amener la touche umami sans dénaturer le plat ? Quelle matière grasse complimentera le mieux ces textures ?



7. Anticiper le dressage


Je ne parle pas (que) de cosmétique ici. Mais plutôt de la réflexion à avoir sur la globalité du repas avant de cuisiner : Y a-t-il besoin d'un accompagnement ? Y a-t-il une sauce qui devra être "pompée" par un féculent ? Faudra-t-il une entrée fraiche ou le plat sera-t-il suffisant ? Est-ce qu'il y a des couleurs ou est-ce qu'il faut en ajouter ? Faudra-t-il un dessert pour rafraichir la bouche ?

Moi par exemple, j'use et j'abuse des herbes fraiches, qui sont très faciles à accorder avec tout et qui ajoutent une touche de fraicheur et de couleur qui améliore la plupart des plats. Je suis hyper fan de noix, entières, concassées, torréfiées, elles permettent souvent la touche de croquant qui manquait. On finit tous par trouver nos trucs qui flattent nos papilles et mandibules sans trop compliquer notre vie. Et on s'inspire des repas au restaurant aussi !

Il y a des chefs qui ne jurent que par les chips, des chips végétales ou de viande PARTOUT. Il y a d'autres chefs qui sont les maîtres des sauces artistiquement disposées en points, bavures contrôlées, etc. Il y a des chefs dont on n'ose toucher les assiettes tant elles paraissent des oeuvres d'art.

Les chefs que je préfère c'est ceux dont le dressage est beaucoup moins prétentieux, ils n'ont pas besoin d'ajouter une touche de ci et une touche de ça à la fin de leur assiette, car leur plat se suffit à lui-même. Du coup leur dressage est simple, chaque élément est utile et mis en valeur, c'est parfait.


Ici, un morceau de poisson grillé (à la perfection), une émulsion (de coques), des pommes de terre (fumées aux sarments), une tombée de feuilles de chou (pour la texture) et un confit de satsuma. Aucun chichi. J'ai mangé cette assiette il y a 4 ans, je me souviens encore de chaque saveur. Pas pour rien que Guillaume Raineix est mon préféré.

8. Observer les gestes des pros


Sur youtube, dans les restaurants, dans des cours de cuisine, chez le boucher, chez la fromagère, au marché. Focaliser sur leurs mains. Je vous en ai parlé l'automne dernier, je passe beaucoup de temps sur youtube a apprendre de nouvelles techniques et de nouvelles recettes. Je vous avais donné la liste des chaînes culinaires avec lesquelles j'ai le plus appris.

Et ça change vraiment tout, au quotidien. Dans "mon" sandwich au jambon, les cornichons c'est la recette de Guillaume Raineix, la moutarde celle de Brad Leone, le pain une recette du NewYork Times et le reste acheté au marché. Et un tel sandwich au jambon, je le paierais volontiers dans une buvette de bord de plage ou de montagne, cher. (Et je vous parle pas de "mon" BLT à la Kenji.)

Mon obsession du moment : je croyais savoir cuire des champignons. Je me trompais. Lourdement. Je désapprends tous mes automatismes. Et je découvre un nouveau monde de saveurs. (Et je mets de la poudre de shiitake partout, hyper facile, des champi séchés, un robot à café-épices pour les réduire en poudre et BAM.)

Avant de tester une nouvelle recette ou un nouvel ingrédient, je vais vérifier sur Bon Appétit et Serious Eats s'ils en ont fait quelque chose. Puis j'étends mes recherches. Pourquoi je ne commence pas par les sites de compilations de recettes comme marmiton (ce que je faisais il y a 10 ans) ? Parce que ce sont des recettes d'amateurs, comme moi. Donc les conseils prodigués sont parfois justes et formidables, et parfois complètement faux. Quand je veux tester quelque chose de vraiment nouveau, je me tourne vers les pros. Et quand je me retrouve ensuite dans ma cuisine, je sais comment je vais m'y prendre.

9. Tester les nouveautés une par une


Si vous testez un nouvel ingrédient : faites-le dans une recette que vous maîtrisez. Pareil pour les recettes : si vous testez une recette que vous n'avez jamais cuisinée, faites un accompagnement, une entrée et/ou un dessert facile, que vous maîtrisez ou que vous avez acheté, il n'y a aucune honte à proposer un chouette terrine de boucher en entrée et des pâtisseries ou de la glace en dessert si vous avez des invités. 
Le fait de réfléchir à la globalité du repas avant de commencer la recette, permet de se libérer la tête ensuite pour se concentrer uniquement sur la nouveauté et oser la créativité.

10. Ne pas avoir peur de rater


Déjà parce que c'est ainsi qu'on apprend (et plus le ratage est spectaculaire, plus la leçon reste gravées, vous ne ferez pas la même erreur deux fois). Je pense que je rate au moins une nouvelle recette sur cinq. Mais par contre, il est très très très rare que ça finisse à la poubelle.
Il y a pléthore de trucs et astuces en ligne pour récupérer des choses que l'on croit ratées (les astuces pour récupérer sauces et mayonnaises par exemple). 
Et sinon, il y a toujours la possibilité de transformer : 
Une viande ou un poisson trop cuit ? Je hache le tout avec d'autres ingrédients qui donnent du goût et j'utilise comme farce pour autre chose (raviolis, hachis parmentier, sauce tomate pour des pâtes, etc.)
Un gâteau/pain qui n'a pas monté ou n'a pas la bonne texture ou qui est brûlé sur le dessus et cru à l'intérieur (vous sentez le vécu ?) : je coupe en cubes ou j'émiette ou je tranche et ça fera la base d'un crumble, d'un tiramisu ou de la chapelure, ni vu ni connu.
Un truc beaucoup trop liquide ? On ajoute un oeuf et un peu de farine et on en fait des "pancakes", c'est super ça marche pour le salé et le sucré.
Un plat trop salé, trop épicé, trop sucré ? Je divise les quantités, je rajoute de la sauce neutre ou du lait de coco, j'essaie de l'acidité, j'utilise comme "condiment" pour une recette que j'assaisonnerai moins ou je transforme en soupe.
Des ingrédients qu'on a oubliés et qui sont abîmés ? Ça finit en soupe ou en jolie tarte aux fruits moches.
Parfois on ne trouve pas toujours la bonne idée de récupération tout de suite. Dans ces cas-là, je garde mon ratage dans un tupperware au frigo, souvent coupé en morceaux, et dans les 2-3 jours j'ai une idée. (Et à la place de ma recette ratée, je me suis fait des ramen instantanées, et c'est toujours bon les ramen.)


Récapitulons

  1. Goûter
  2. Se préparer avant de cuisiner et lire la recette en entier
  3. Faire une mise en place
  4. Assaisonner chaque composant du plat
  5. Penser aux textures
  6. Penser aux 7 goûts
  7. Anticiper le dressage
  8. Observer les gestes des pros
  9. Tester les nouveautés une par une
  10. Ne pas avoir peur de rater


11. Toujours avoir des ramen instantanées dans ses placards.



J'espère que cet article vous a donné envie de cuisiner des nouveautés et je me réjouis de voir les résultats. Je vous propose d'utiliser le tag #JaiOséTester (avec l'accent, comme ça on est sûrs d'être entre nous avec bienveillance) sur instagram ou twitter pour qu'on puisse toutes et tous voir les résultats.

Vous donner envie de cuisiner et tester des nouveautés, c'est une des raisons pour laquelle mes articles de recettes sont trèèèèès longs et que j'explique tout, le plus en détails possible. Ce n'est pas pour que vous suiviez à la lettre, c'est pour que vous compreniez comment et pourquoi j'ai fait mes choix, afin que vous puissiez faire les vôtres en toute connaissance de cause.

Toutes mes recettes sont classées sur cette page.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire