Le marché aux poissons
Quand on voyage dans des villes cosmopolites et touristiques, les restaurants se comptent par milliers, voire dizaine de milliers, surtout dans les quartiers touristiques, difficile de faire un choix. Si j'aime autant Istanbul, c'est aussi parce que j'adore y manger. On peut y manger à n'importe quelle heure du jour (et jusque très tard dans la nuit) et la variété est impressionnante. Il n'y a pas une cuisine stambouliote mais de multiples cuisines turques et internationales qui se côtoient, se mélangent, se réinventent, avec un principe simple : des produits locaux et extrêmement frais, ce qui en fait une cuisine joyeuse et bon marché... à condition de savoir où l'on met les pieds. Quelques conseils.
1) le guide "Istanbul Eats - Exploring the culinary backstreets" tu achèteras
A acheter impérativement, aux
éditions Boyout (soit
en ligne avant de partir, soit sur place dans la boutique du musée
Topkapi ou dans les librairies avec un rayon en anglais ou un rayon touristique, mais vous gagnez du temps à l'avoir dès votre arrivée). Les auteurs vous guideront avec beaucoup d'humour dans les lieux où mangent les Stambouliotes, que ce soient les stands de rue, les restaus très populaires ou les centaines de
lokantsi ou
meyhane (= petits restaurants ou auberges typiques) où se sert ce qu'il y a de mieux à Istanbul. Les prix ne sont pas indiqués car la Lire Turque (TL) varie beaucoup mais les prix vont de très modeste à bon marché.
Ali Baba Kanaat Lokantsi, juste derrière Suleymanyie Camii
2) les restaurants à touristes tu oublieras
C'est cher et souvent pas très bon, peu varié, avec un service désagréable. Et quoi de plus horrible que de manger très moyennement entourés de Parisiens/Romains en vacances qui racontent à quel point ils ne voient pas l'intérêt de visiter Sainte Sophie alors qu'ils n'ont simplement pas vu que l'on pouvait monter dans les étages ou qui se félicitent mutuellement d'à quel point Paris/Rome sont vraiment de plus belles villes. C'est un coup à mal digérer. Alors que l'on mange tellement bien dans les lokantsi ou meyahnes pour quelques lires et il y a des milliers de restaurants de toutes gammes à découvrir. Si vous devez faire un restaurant "chic" un soir, choisissez un restaurant dans le quartier de Beyoglü avec terrasse sur le toit et la vue sur Istanbul by night. Il est possible également de ne s'y arrêter que le temps d'un cocktail, par exemple à l'Hôtel Anemon Galata, vue sur la tour, la corne d'or et la fameuse skyline. (Attention toutefois, à Istanbul, l'alcool est très cher, vous paierez une bière 6 fois le prix d'un thé, par exemple.)
3) à ton hôtel tu ne (petit-)déjeuneras PAS
Plusieurs raisons, d'abord parce que le petit-dèj. n'est pas compris dans le prix de la chambre, qu'il est assez cher et qu'il est composé d'un buffet gargantuesque (dans 90% des hôtels en tout cas). Donc pour "rentabiliser" tu as tendance à remplir ton assiette et ton estomac et du coup, tu vas rater le repas de midi, ce qui serait horriblement dommage. Ensuite, parce que le (petit-) déjeuner typique stambouliote est un vrai bonheur. D'abord, un jus de grenade frais. Ne t'inquiètes pas si le serveur ne revient pas tout de suite, ça prend du temps, il faut une bonne quinzaine, voire plus, de fruits pour faire un petit verre. Tu demandes une paille, à cause des morceaux, et tu me fais plaisir, tu le bois dans la rue, dans une minuscule échoppe avec des tables et des tabourets en bois. Tu alpagues juste avant un vendeur de Simit (pains ronds au sésame ou au pavot) que tu partages en deux. Et tu dégustes. Oui, c'est un peu amère à la première gorgée, mais ensuite, ça explose en bouche et la douceur du fruit se révèle. Certains n'aiment pas c'est des cons c'est pas grave le jus d'orange frais est tout aussi bon. Quand tu as finis ton jus, tu vas prendre un café, un vrai, un turc. La meilleure adresse pour ça c'est :
4) Le meilleur café du monde tu savoureras
C'est à Çorlulu Alipasa Medresesi que tu trouves LE MEILLEUR CAFE DU MONDE. Non, je n'exagère pas. Ce n'est pas facile à trouver, mon conseil : tu prends le tramway jusqu'à Çembrelitas, là tu descends et tu marches en direction du Grand Bazaar sur Divan Yolu Cad. D'abord tu t'arrêtes pour prendre un jus de grenade, il y a plein de minis échoppes le long du chemin. Ensuite, tu cherches cette porte un peu bizarre, quelques dizaines de mètres avant d'arriver à la station de tramway Beyazit (celle du Grand Bazaar), qui n'inspire pas confiance et tu entres.
Tu vas y trouver des tables, des gens qui fument, des gens qui jouent aux dominos, des buveurs de thé, des chats, un vendeur de pipes à eau (il est adorable et ses pipes sont magnifiques) et le MEILLEUR CAFE DU MONDE. Oui, je me répète. TU DOIS Y ALLER. Vraiment. Alors bon, les serveurs ne parlent pas anglais, c'est pas bien grave, tu dis café, tu montres combien tu en veux. Ils vont te demander un truc, tu dis oui ou non avec la tête selon si tu veux du sucre.
Quand tu reçois ton café, tu attends. On est pas à un comptoir italien, on ne boit pas un ristretto vite fait avant de repartir. On attends que le marc se dépose au fond de la tasse. On ne remue pas sa tasse, on pose délicatement les lèvres sur la mousse crémeuse et on aspire par petites gorgées. Bref, non, tu prends pas ton (petit-)déjeuner à l'hôtel.
5) Le marché aux poissons
Une autre de mes adresses préférées, c'est le marché aux poissons. Juste à côté du pont Galata, côté Karaköy, on le voit facilement depuis le pont de jour comme de nuit. D'abord on traverse le marché et pour qui aime ou connait un peu le poisson et les fruits de mer, c'est aussi réjouissant que le Grand Bazaar et ça donne immédiatement faim.
Après le marché, on arrive sur un genre de petite place avec pleins de tables, les tables vertes c'est chez Akin Balik. Si vous venez en début d'après-midi, vous aurez le lieu pour vous et le temps de découvrir tout ce qu'ils proposent. Plusieurs serveurs parlent bien anglais et ils ont un frigo à bières (oui, ça mérite d'être souligné) qui se trouve à côté de leur propre étal de poisson où ils vous invitent volontiers à aller choisir votre festin directement. Le poisson est grillé entier, servi avec leur genre d'épinard local délicieux dont je ne retiens jamais le nom, du citron, de l'oignon cru et une corbeille de pain. En entrée, je vous recommande le calamar frit, servi avec un fromage frais, c'est à se lécher les doigts (deuxième fois que je convaincs quelqu'un de goûter, deuxième fois que la personne, persuadée de ne pas aimer ça, est conquise), mais mon coeur balance avec les moules farcies ou la soupe de poisson.
Le lieu est vraiment agréable et permet de se reposer au frais après une longue marche, pas de bruits de voiture, quelques bateaux qui s'arrêtent et des chats gourmands. Je ne vous parle même pas du poisson tellement c'est évident que c'est absolument délicieux, même si je n'arrive toujours pas à savoir si je préfère le loup ou la daurade. Les prix sont absolument riquiqui... sauf pour la bière, comme toujours.
Attention si vous venez le soir, il faut penser à réserver (Akin Balik 212 244 9776, ouvert tous les jours de 11am à 3am, faites appeler par votre hôtel) et les serveurs seront moins disponibles, je ne sais pas combien ils ont de couverts, mais c'est particulièrement impressionnants. Pour les jours d'intempéries, ils ont une salle tout à fait pittoresque, façon taverne de marins.
Comme souvent à Istanbul je marche beaucoup le matin, j'ai faim tard (genre 14h) et j'en ai marre de marcher, le marché au poisson est devenu un de mes lieux favoris pour m'arrêter me reposer. Après avoir mangé, je retourne parfois faire quelques parties de backgammon sous le Pont Galata en buvant quelques bières et en regardant la lumière tomber sur Yeni Camii (= New Mosq) et la partie asiatique de la ville.
6) les restaurants anatoliens
Un autre truc à tester absolument à Istanbul. C'est là où l'art des entrées façon méditerranée montre toute sa splendeur, qu'on préfère les appeler tapas, antipasti ou mezze, on s'en fout. Attention toutefois, on vient vous présenter un plateau où TOUT fait envie, mais les prix ne sont pas sur le plateau. La plupart des mets ne coûtent qu'une bouchée de pain, mais certains ingrédients (le poulpe par exemple) sont plutôt chers (alors que le calamar ne coûte pas grand chose, jamais compris).
N'ayez pas les yeux plus gros que le ventre, les portions ne paraissent pas grandes mais sont généreuses. Il est possible de revoir le plateau et de reprendre d'autres choses si vous voulez faire un repas entier avec des entrées froides. Mais c'est dommage, vous rateriez les spécialités chaudes qui valent le détour également (cette fois-ci à commander à la carte). Le guide "Istanbul Eats" nous a conseillé Sofyali 9, je valide. Le lieux est tout à fait charmant, le service très agréable et même s'il y a des touristes, les clients locaux sont nombreux et les prix abordables. (Sofyali Sokak 9, tout près du début d'Istikal Cad, tous les jours de midi à minuit, vaut mieux réserver le soir au 212 245 0362, la carte est réduite le midi).
Il y en a un autre, d'anatolien, qui vaut le détour :
Kiva Han. Il est très très très facile à trouver, sa terrasse est à l'ombre de la tour Galata. On penserait à un attrape touriste mais non, bien au contraire. La vue est absolument magique et le contenu des assiettes est simplement parfait. Le lieu idéal après une virée shopping dans
Galipdede Cad. (Il y a aussi un restaurant dans la
Tour Galata, c'est un attrape-touriste sans intérêt. Monter sur la tour est payant et ne vaut pas le coup, de très nombreux toits-terrasses de restaurants et d'hôtel offrent la même vue gratuitement.)
7) les kebabs c'est pas des sandwichs
LA grande spécialité d'Istanbul, ce sont les kebabs. Et kebabs ne veut PAS dire sandwich de rue sur un truc à viande qui tourne, pour ça on dit döner (= tourner). Vous en trouverez partout, des restaurants à touristes (ON A DIT NON) aux plus populaires lokantsi, c'est délicieux, épicé, pas cher, copieux, à se lécher les doigts et il y en a PARTOUT. Les döners aussi il y en a partout d'ailleurs, mais on trouve les mêmes chez nous, à quoi bon ?
J'ai faim.