Peut-être vous souvenez-vous, durant l'été 2013, d'un énorme ballon rouge dans les rues lausannoises. C'était le RedBall Project de l'artiste Kurt Perschke invité par le Festival de la Cité. J'ai flashé sur cette oeuvre d'art contemporain qui fait voir les rues où l'on passe tous les jours sous un autre oeil et qui provoque des rencontres et des réactions inattendues. Kurt m'avait d'ailleurs raconté combien c'est ce qu'il préfère dans ce projet qu'il fait voyager partout dans le monde depuis 13 ans, comment cette "simple" balle rouge géante n'était qu'un support à l'expérience, à la rencontre, à la collision entre le quotidien et l'extraordinaire. J'avais tellement aimé ça qu'il m'avait nommé parmi ses premiers Circle Members.
Deux ans plus tard, je vais retrouver ce ballon géant (et son créateur) à Bordeaux, pour le festival Novart 2015. Du 3 au 11 octobre, tous les jours, la RedBall se posera dans les rues bordelaises. Si j'en crois mon expérience, elle se fera bousculer, on rebondira dessus, des centaines de photos seront prises devant, dessus, dessous, autour, de près, de loin, et elle se fera même embrasser.
Tout ça pour vous dire que durant le mois d'octobre, ce blog sera probablement très silencieux. Vous pourrez néanmoins me suivre sur instagram où je promets de ne pas focaliser que sur la baballe mais de faire honneur à la bonne chair locale.
Dès novembre, comme Lausanne à Table c'est fini pour 2015 (mais on prépare déjà 2016, évidemment), je serai beaucoup plus disponible pour des offres un peu folles (que j'ai presque toutes refusées cet été), alors n'hésitez pas !
Si vous êtes dans la région bordelaise, passez me dire bonjour et voir le RedBall Project, c'est un souvenir inoubliable (et je serai pas loin, autour, en train de vous observer interagir...).
Le Vacherin Fribourgeois a fêté ses dix ans d'AOP début septembre (AOP = appelation d'orgine protégée, ce qu'on appelait avant AOC). Pour l'occasion, l'Interprofession du Vacherin Fribourgeois a organisé un charmant voyage de presse. Un petit tour à l'alpage pour voir la fabrication d'un Vacherin Fribourgeois suivi d'un magnifique repas cuisiné par le mythique chef Pierrot Ayer.
Alors le côté voyage de presse peut vous paraître un peu rébarbatif, mais j'ai passé une journée extra, que je vais donc vous raconter, comme d'habitude, en trop long, trop large et trop de travers, avec trop de photos et même une vidéo trop longue. Même pas peur. Peut-être faut-il commencer par vous dire que le Vacherin Fribourgeois est mon fromage préféré, et que parmi les sortes de Vacherin Fribourgeois (il y en a 6 qui dépendent de la durée d'affinage ou du type de production) c'est celui d'alpage que j'aime le plus, j'étais donc acquise avant même de partir, mais très curieuse de savoir ce que j'allais pouvoir apprendre (et goûter, on ne se refait pas).
Un petit mot d'histoire ?
Le Vacherin Fribourgeois a longtemps été un produit "petit frère" du fameux et mythique Gruyère connu loin à la ronde, lui est toujours resté plus local, typiquement fribourgeois. Il était au départ produit dans les alpages et les laiteries avec le lait en surplus des quotas de Gruyère. Les meules sont plus petites (6 à 10 kilos), le lait est souvent cru ou thermisé et il est produit avec du lait entier (contrairement au Gruyère qui est produit avec du lait écrémé, ce qui permet l'obtention de la sublime double crème de gruyère). Le Vacherin Fribourgeois est un fromage mi-dur, affiné moins longtemps (entre 3 et 9 mois au maximum alors qu'on trouve des Gruyères de 24 mois par exemple) et, surtout, beaucoup plus crémeux. C'est grâce à lui que les fondues, les vraies, celles du Canton de Fribourg, existent.
Un petit mot sur la fondue, quelles sont celles que je considère comme les vraies fondues ? La moitié-moitié (Gruyère et Vacherin Fribourgeois) ou la fondue au Vacherin, évidemment. La seule autre qui a grâce à mes yeux car elle obtient une texture similaire à la moitié-moitié, c'est celle de Haute-Savoie dans la vallée d'Abondance car ils produisent de l'Abondance, cousin proche du Vacherin Fribourgeois, mais je m'égare. A chaque fois que quelqu'un essaie de me faire goûte une autre fondue, imanquablement, je trouve sa texture et son goût décevant. (Meilleure adresse à Lausanne : la Pinte Besson. Point barre, pas de discussion.) (Oui, je suis une ayatollah de la fondue, j'assume.)
Revenons à nos meules. Le Vacherin Fribourgeois est un fromage connu donc grâce au développement de la fondue, mais trop méconnu à la coupe (ou "à la main" comme disent les fromagers de la région), alors que grâce à son crémeux, à son goût inimitable et à sa capacité à fondre à basse température (en-dessous de 50 degrés), il a toutes les qualités nécessaires pour un très grand nombre d'autres plats ou juste pour mes tartines.
Fin décembre 2014 s'ouvrait l'Eligo dans le quartier du Rôtillon à Lausanne. "Eligo" est un terme latin qui veut dire faire un choix. Par exemple un choix de vie : quitter une grande table réputée et une carrière étoilée pour faire de la cuisine de marché, comme Guillaume Raineix, ou quitter une carrière théâtrale et cinématographique pour revenir au métier de la restauration, comme son associé Gabriele Bazzichi. Cela veut aussi dire choisir toujours le meilleur produit disponible, choisir de travailler avec les saisons, choisir des producteurs d'excellence (quand Guillaume parle des frères Alaca et de leurs jambons ou de Niels Rodin et de ses agrumes, il n'y a pas que vous qui salivez, lui aussi !).
Quand à Lausanne à Table nous avons décidé de relancer les Tables Uniques cette année, il était impensable de ne pas proposer à Guillaume Raineix de participer. Il lui a fallu environ 30 secondes pour nous dire : "ok, quelles dates ?" La première tombait en juin et Lukas de Guérilla Gourmande avait eu la place en strapontin au bout de la table des 8 heureux tirés au sort (son récit). La deuxième tombait cette semaine, le menu avait forcément changé, Guillaume m'a proposé de prendre la 9e place, je n'ai pas dis non !
J'avais déjà mangé plusieurs fois à l'Eligo, toujours à midi, et adoré chacune de mes visites. (J'ai déjà parlé de son extraordinaire sashimi de sériole, mais je pourrais faire un poème sur sa bisque d'écrevisses du lac, sa tartelette aux fraises, son poireau vinaigrette ou son sorbet de chocolat noir à la fève tonka.) Mais cette fois c'était particulier. Les 8 autres convives et moi avons pris place à la "table d'hôte", c'est-à-dire la table haute qui a une vue plongeante sur la cuisine vitrée. Pour l'occasion, le restaurant était fermé, par contre, la porte de la cuisine était grande ouverte et nous ne nous sommes pas fait prier pour la passer.
En amuse bouche, une terrine de sanglier et foie gras, un peu de pomme confite, un cornichon en pickle maison, tout ça posé au milieu de la table et Guillaume qui vient faire connaissance avec sa tablée. L'ambiance a tout de suite pris, les questions fusent sur les produits dans les assiettes, sur "l'autre resto du bord du lac", entrecoupées de "mmmmmh c'est bon ça". (Le Chasselas La Morraine des Vins de Lausanne, qui ont accompagné tout le repas, n'était peut-être pas étranger à la prise rapide d'ambiance...)
En entrée, j'ai eu la joie de voir apparaître des écrevisses du lac, avec quelques tomates confites, nappées d'un velouté. J'avais adoré la bisque d'écrevisses quelques semaines plus tôt, mais là c'était encore meilleur. Ces tomates cerises confites au four ajoutaient une jolie profondeur et une acidité très agréable, ces écrevisses sont vraiment un magnifique produit. Le Pinot Gris la Plantaz du Château Rochefort qui l'accompagnait formait un accord parfait.
Après quelques minutes de silence dégustatif, j'entends quelqu'un dire "hé, funambuline a liké ma photo" et Gabriele mort de rire qui répond, oui, elle est au bout de la table. Le tirage au sort avait bien fait les choses, on était tous sur instagram... y compris Guillaume, et on s'est amusé à se liker parmi pendant la soirée.
Le poisson qui suivait a été mon coup de coeur du repas, cuisson parfaite, évidemment, mais c'est dans le mélange des saveurs que tout le charme de cette table se dévoilait. Des pommes de terre fumées (aux sarments de vigne) relevaient la tendresse de l'émulsion et des coques, le confit de citron satsuma (un hybride citron-mandarine magnifique) exacerbait la finesse du maigre, le croquant et la fraicheur du chou pointu terminait d'équilibrer le tout en saveurs et en textures. Et au final, ce plat paraît tout simple, pas de chichi, pas de construction architecturale dans l'assiette qui nous rend timides à l'attaquer, rien d'incompréhensible, juste l'équilibre et la simplicité de magnifiques produits mis en valeur. C'est généreux, simple, délicieux, précis.
Après ces émotions, tout le monde a déserté la table pour le dressage de la viande. L'année prochaine il faudra appeler ça "cuisine unique" et non "table unique" à l'Eligo...
Pour chaque élément disposé dans les assiettes, Guillaume nous en détaillait la préparation ou le prénom de la carotte du producteur de la carotte (glacée au miel) ou l'origine (limousine pour la moutarde violette). Exemple avec les herbes fraîches ajoutées à l'assiette, où il se retient de dire "je pense qu'on ajoute souvent des herbes qui ne servent à rien à part la déco" avant d'expliquer comment il a sélectionné les siennes.
Le boeuf parthenaise aurait pu se découper sans couteau, le très léger jus aux olives et la moutarde violette contraient la douceur de la viande, accentuée par la purée de patates douces et les carottes. Magnifique.
Après une nouvelle pause discussion, arrive le dessert, des figues rôties et une glace au pain d'épices "packée" #privatejoke. Tout est savouré avec le même plaisir non dissimulé par les convives. Le Pinot Noir & Pinot Gris en Méthode Traditionnelle des Vins de Lausanne ne gâche rien.
Et on continue à discuter. On boit un café. On continue à discuter. On va visiter la cave. On continue à discuter. On sort fumer prendre l'air frais et on continue à discuter. On va visiter l'étage. On continue à discuter. Plus personne ne voulait quitter le lieu. On a fini par avoir pitié de Guillaume et Gabriele qui ont sacrifié leur seul soir de libre pour nous offrir cette magnifique soirée et nous en aller... boire un dernier verre chez le voisin (le Café des Artisans)... et continer à discuter.
C'est à cette occasion qu'un autre convive m'a aidé à trouver LE défaut de la soirée, parce qu'il faut bien une critique, non ? La deuxième figue rôtie était peut-être de trop. Peut-être.
Vous l'aurez compris, j'ai adoré. Merci à toute l'équipe de l'Eligo d'accepter nos propositions un peu barjots de Lausanne à Table avec autant de gentillesse et d'enthousiasme. Merci à mes collègues de l'association Lausanne à Table que j'en profite pour embrasser. Merci aux autres convives de la soirée, l'ambiance était géniale grâce à vous. Et merci à Guillaume et Gabriele pour votre accueil généreux. Longue vie à l'Eligo !
Si vous n'avez pas encore eu l'occasion ou osé aller visiter cette magnifique table, je vous encourage vivement d'aller tester le midi. Pour la modique somme de 29 CHF pour le plat du jour, vous pourrez déguster le talent de Guillaume. C'est environ 40 CHF si vous ajoutez une entrée ou un dessert. La carte est plus complète le soir si vous décidez de vous offrir un menu dégustation. Le samedi midi c'est encore une autre histoire avec un service "sortie du marché", j'ai vu les saucisses qui seront servies cette semaine... ne ratez pas ça !
Depuis 2 ans, la traditionnelle "rentrée" des séries, qui se situait entre mi-septembre et mi-octobre (et à nouveau entre mi-mars et mi-avril pour le printemps), perd de sa superbe. Et par la même occasion, et mon plus grand bonheur, l'été n'est plus un désert rempli de bluettes adolescentes parfumées guimauve. Deux raisons à ces changements :
L'arrivée tonitruante de Netflix et de ses diffusions de saisons entières à des dates qui ne correspondent plus aux canons imposés anciennement par les chaînes de tv classiques, méthode suivie par d'autres diffuseurs alternatifs (tel qu'Amazondont j'ai décrit le système) qui a même fait des émules dans les chaînes classiques qui donnent aujourd'hui parfois à voir plusieurs épisodes d'un coup en ligne pour accrocher les spectateurs à une série (ce qu'a fait la chaîne lifetime cet été avec UnReal).
L'autre raison c'est le gros succès de certaines séries "d'été" ces dernières années. Il y avait deux périodes sériesquement (j'invente des mots si je veux) mortes il y a 5 ans : juin-septembre et décembre-février. Personne ne se risquait à des séries courtes (13 épisodes maximum) dans des moments où la majorité des specteurs étaient encore des spectateurs de télé classiques, c'est-à-dire bloqués à la maison au moment de la diffusion de leur épisode s'ils voulaient suivre une série. L'explosion des normes narratives et temporelles des séries et les nouveaux modes de consommation des spectateurs font petit à petit perdre tout sens à un découpage de l'année par "saisons" (quoi que la plupart des chaînes traditionnelles, continuent à s'y plier avec leur oeillères inamovibles, en particulier en Europe).
Bon, maintenant que vous avez dû supporter ma théorie, vous vous demandez, mais pourquoi elle nous raconte ça ? Et bien parce que si je me suis plainte avant l'été de la maigre récolte de séries en 2015, la donne a changé grâce à un été fourni en surprises inattendues. Je ne vais pas perdre de temps à vous parler de celles qui, à mon avis, ne valent pas la peine (comme la saison 2 de True Detective, où je me suis endormie à chaque épisode), pour vous parler uniquement de mes coups de coeur, d'accord ?
Mr Robot
Après un seul épisode, j'étais emballée par Mr Robot qui se profilait comme la série de l'été. A la fin de la saison, je suis toujours aussi enthousiaste. L'histoire de hackers qui veulent changer le monde en faisant tomber une méga-entreprise-méchante-et-maléfique est suffisament séduisante (et lisse) pour plaire à tout le monde (même des capitalistes endurcis qui vont trouver ça amusant), tout à fait dans l'air du temps.
Le brio de cette série est ailleurs. Le personnage principal est porté par un acteur impressionnant qui réussit à nous faire suivre ses états d'âmes à travers son regard, et une voice-over très bien écrite. Le mode d'implication du spectateur dans la psyché du héros est brillant. Le reste du casting fonctionne très bien également, même les petits rôles.
La qualité visuelle et rythmique des épisodes sont impressionnantes, la réalisation et le montage sont magistraux. Ce dernier est d'ailleurs un des points les plus importants au développement du personnage principal, c'est grâce au cadrage, aux hors-champs et à certaines junk cuts que la réalité que l'on apprend à la fin de la saison devient de plus en plus palpable. En particulier dans les moments où nous sommes dans la tête d'Elliot (incarné donc par Rami Malek, souvenez-vous de ce nom). Et les cadres sont juste beaux, vraiment beaux, un travail sur les couleurs (souvent neutres avec une touche de couleur vive, avec une claire dicotomie entre le monde "blanc" de l'entreprise et "noir" du hacking), beaucoup de symétrie, des lumières crues, des visages filmés parfois de très près avec des peaux rugeuses et des yeux fatigués. J'arrête là, je pourrais vous en détailler chaque séquence. A voir absolument si vous êtes cinéphiles.
Ou à revoir en connaissant l'issue de la saison pour en apprécier les détails de réalisation et de construction narrative, comme une gourmandise, je ne m'en suis pas privée.
Un vaisseau dans l'espace, le Raza, six personnes se réveillent à son bord sans aucun souvenir de leurs identités et de leur mission. Avec l'aide d'un androïde, ils vont petit à petit démêler les fils de leurs identités et de leur histoire, tout en devenant un équipage. "Un" (ils se prénomment selon leur ordre de réveil) est un joli garçon un peu trop sentimental mais plutôt intelligent, "deux" devient rapidement la capitaine de l'équipage sans que cela ne soit remis en question par les autres, elle est puissante, combative et juste, "trois" est un gros bras qui baptise ses armes, d'une loyauté à toute épreuve, "quatre" est un maître en maniement du sabre (pas laser mais bien japonais), "cinq" est une adolescente qui se découvre génie de la mécanique avec un lien télépathique particulier avec chacun des membres de l'équipage, la geek de l'étape (il en faut une en 2015 si vous voulez que votre série marche), "six" est un gros bras qui cherche l'apaisement dans les conflits. Quant à l'androïde, elle va petit à petit se rendre compte qu'elle développe des sentiments, un bug dans sa programmation.
Commençons par le commencement : Lausanne est une ville gourmande, la Suisse Romande est une région gourmande, la Suisse est un pays gourmand. On le sait, de plus en plus d'événements tentent de promouvoir le bon manger, le bien boire et la convivialité grâce à nos magnifiques produits locaux. Ok, c'est noté. Mais était-il vraiment, vraiment, nécessaire d'organiser tous ces événements en même temps durant le mois de septembre ?
Je plaide coupable, avec Lausanne à Table, c'est un de nos mois les plus chargé, mais nous ne sommes pas les seuls. Je me suis dit qu'il était temps de mettre de l'ordre dans tout ça. Nous sommes le 2 septembre, voici une (croyez-le ou non) petite sélection des événements gourmands de la région durant le mois de septembre, il faudra faire des choix, ce sera dur, mais ce sera bon.
Un dernier détail avant de nous lancer allègrement dans l'agenda : pitié, n'organisez plus d'événements en septembre, pitié.
Semaine du 1 au 6 septembre
3 septembre : la Balade des potagers, par Pierre Corajoud. J'ai adoré celle de l'année dernière, celle-ci ira encore plus loin dans l'insolite. (Après des désistements, il reste quelques places, inscriptions ici.)
5 septembre : toute la journée, l'Atelier fête sa première année ! Je n'arrive pas à croire que ce lieu n'a qu'un an tant il est déjà inscrit dans mes habitudes ! Pour l'occasion, il y aura musique, food truck, pop up bar and tutti quanti, ces dames savent recevoir.
5 septembre : soirée Krautfunding. Quoi ? Le financement par le chou ? Et oui, une soirée choucroute et musique pour aider les merveilleux (mais très pauvres) organisateurs du LUFF. Soyons choux, soutenons-les !